Présidentielle 2022 : Le baroud d’honneur de la « Primaire populaire » pour l’union de la gauche

REPORTAGE Pour convaincre Mélechon, Hidalgo et Jadot de participer à la Primaire populaire et unir la gauche, les organisateurs du vote ont décidé de faire des sit-in devant les sièges des partis

  • Le vote de la « Primaire populaire » est prévu du 13 au 16 janvier.
  • Ce mouvement citoyen a pour objectif de désigner un candidat commun à la gauche pour la présidentielle.
  • Depuis quelques jours, ses membres organisent des sit-in devant les sièges d’Europe Ecologie-Les Verts, du Parti socialiste et de La France insoumise.

Les militants et militantes de la « Primaire populaire » ont la foi. Ça tombe bien : pour vanter l’union de la gauche à la présidentielle, il en faut. Depuis des mois, l’association peine – c’est un euphémisme – à convaincre les principaux partis d’effectivement participer à une primaire réunissant les forces de gauche. Alors place aux actes : depuis lundi et jusqu’au 30 novembre, des bénévoles font le pied de grue devant les sièges d’Europe Ecologie-Les Verts, du  Parti socialiste et de La France insoumise

Comme chaque jour depuis lundi, Gaëlle Guillou, coordinatrice des bénévoles de la Primaire populaire en Île-de-France, s’est installée, ce jeudi, devant le siège de la France insoumise, dans le 10e arrondissement de Paris. Armée de deux pancartes orange, d’une gourde et d’un sac plastique pour éviter de mouiller son pantalon lorsqu’elle s’assoit à même le sol, elle tente d’interpeller les militants et militantes insoumises qui passent. « Je viens de la fin de matinée jusqu’à 15h, comme ça, je profite des entrées et sorties de la pause déjeuner », explique la jeune femme de 23 ans à 20 Minutes.

Faire de la pédagogie

L’idée est bien sûr de faire de la pédagogie autour de cette primaire, dont on ne comprend pas toujours très bien les contours : depuis six mois, plusieurs dizaines de milliers de personnes ont parrainé des candidats et des candidates à la Primaire populaire, dont certains n’avaient pas fait acte de candidature. Ainsi, Christiane Taubira, qui a déclaré forfait pour la présidentielle, fait partie – avec Jean-Luc Mélenchon, Yannick Jadot et Anne Hidalgo – des dix personnalités qualifiées pour le vote qui doit avoir lieu du 13 au 16 janvier. Autre subtilité : le vote se fera au jugement majoritaire (les votants s’expriment sur chaque candidature, celle qui a la « meilleure note » gagne).

Au quatrième jour du sit-in, les choses ne se passent pas trop mal. Mardi, Gaëlle Guillou a même croisé Jean-Luc Mélenchon, qui lui a demandé si elle n’avait pas trop froid. On lui propose parfois du café. « Mais ça se tend parfois, certaines personnes s’agacent en me voyant tous les jours », note la militante. « On reconnaît que venir devant les sièges de parti comme ça, c’est un message dur, mais on assume », affirme Robin Le Prioul, du pôle mobilisation de la Primaire populaire, aussi présent jeudi matin devant le siège de LFI.

Câlins gratuits

Mais tout est affaire de doigté, car il ne s’agit pas non plus de braquer les partis, qui ont jusqu’au 30 novembre pour confirmer ou non leur participation. Alors l’association s’est dotée d’une mascotte : le nounours de la Primaire populaire, pour donner des câlins gratuits et « montrer que oui, on leur met la pression, mais on les aime », explique Robin Le Prioul. L’ours, qui n’a pas vraiment de nom, affirme être « dans une dynamique de l’amour ». L’argument sanitaire et quelques différents politiques l’empêcheront néanmoins d’avoir le succès escompté devant le bâtiment. Parfois, un dialogue s’engage devant la porte du bâtiment, mais tourne court face aux incompréhensions de part et d’autre.

Au Parti socialiste, devant lequel les militants et militantes de la Primaire populaire campent aussi – mais disent rencontrer moins de monde –, on affirme ne pas voir l’initiative « d’un mauvais œil ». Et même avoir « le plus grand respect » pour ses promoteurs. Olivier Faure, le premier secrétaire du PS, les a d’ailleurs rencontrés, précise auprès de 20 Minutes Pierre Jouvet, porte-parole du parti. Mais ça s’arrête là. Pour lui, la démarche arrive trop tard : « Désormais, tous les partis ont leur candidature, on ne pourra pas faire de rassemblement sur le fond. » Ou trop tôt : « Ma conviction, c’est que le rassemblement pourrait encore se faire, mais au milieu de l’hiver. A ce moment-là, Anne Hidalgo apparaîtra comme celle qui est la mieux placée et les autres devront s’interroger. » Chacun voit évidemment le rassemblement à sa porte.

Le Primaire populaire ne pèse pas lourd

Les 165.000 inscrits et inscrites et inscrites à ce jour pour la Primaire populaire ne semblent pas peser bien lourd. « Et pourtant, c’est huit fois le nombre de voix obtenu par Anne Hidalgo au vote interne au PS, c’est déjà plus qu’à la primaire écologiste ! », s’insurge Gaëlle Guillou. Devant le siège de la France insoumise l’argument ne fonctionne pas, puisque Jean-Luc Mélenchon revendique déjà 260.000 parrainages citoyens. « Venez nous rejoindre ! », dit-on côté insoumis. « Mais vous pensez qu’il peut gagner seul ? », répondent les pro-primaire.

C’est peu de dire que les membres de la Primaire populaire ne comprennent pas la stratégie des partis de gauche, en l’occurrence des insoumis : « S’ils pensent que Jean-Luc Mélenchon n’est pas capable de gagner la primaire, comment pourrait-il gagner la présidentielle ? », demande Robin Le Priol. Pourtant pas désespéré, il affirme que la Primaire populaire reçoit des signaux positifs et de nouvelles recrues tous les jours. Le militant prévient qu’ils « iront jusqu’au bout » et seront bien là tous les jours devant les sièges de LFI, d’EELV et du PS. Avec une personne à chaque fois – « parce que le symbole est plus fort qu’avec un groupe » –, le chemin semble étroit.